Article de Caroline Megglé paru le 22 mai 2017 “La Mission d’appui au développement des clauses sociales organise la rencontre entre acheteurs publics et entreprises solidaires”
Pour que les entreprises solidaires franciliennes puissent accéder davantage aux marchés publics, notamment dans le cadre du Grand Paris, une Mission d’appui au développement des clauses sociales, financée par l’Etat et l’Union européenne, est actuellement conduite par le GIP Maximilien. Ce dernier organisait le 18 mai une rencontre entre acheteurs publics et entreprises solidaires du numérique.
A l’initiative du groupement d’intérêt public Maximilien (portant la plateforme des marchés publics franciliens du même nom), une rencontre entre acheteurs publics et entreprises de l’économie sociale et solidaire de la région Ile-de-France s’est tenue à Nanterre le 18 mai. Objectifs : donner l’occasion à des structures de l’insertion par l’activité économique (SIAE), des entreprises adaptées (EA) et des établissements et services d’aide par le travail (Esat) de communiquer sur leur offre de services, permettre également aux acheteurs publics de la région francilienne de mieux faire connaître leurs besoins. Avec un contexte potentiellement attractif pour ces entreprises : celui des chantiers du Grand Paris.
Ces derniers constituent une “opportunité formidable” pour le développement économique, l’emploi et l’inclusion sociale, a considéré Corinne Cherubini, directrice de la Direccte (1) Ile-de-France, en préambule de l’événement. A condition de veiller activement à faciliter l’accès des TPE-PME aux marchés et à développer les clauses sociales et environnementales. En signant à l’automne 2015 une charte de responsabilité sociale des entreprises (RSE), la Société du Grand Paris (SGP), la SNCF et la RATP avaient formulé à ce sujet plusieurs engagements (voir notre article du 12 octobre 2015). Dans le cadre du Grand Paris Express, la SGP entend ainsi confier au moins 20% des travaux (en cotraitance ou en sous-traitance) à des PME et imposer aux attributaires de ses marchés qu’un minimum de 5% des heures de travail soient réalisées par des personnes en insertion.
Appui aux clauses sociales : un pilotage régional et des coordinations dans les huit départements
Dans le prolongement de cette charte et sous l’impulsion de la Direccte Ile-de-France, une Mission d’appui au développement des clauses sociales (Macs) a été mise en place en juillet 2016 pour “répondre aux enjeux d’emploi des nombreux projets d’aménagement du Grand Paris” et, plus largement, développer les “clauses sociales dans la commande publique francilienne”, selon Alice Le Moal, Conseillère départementale des Hauts-de-Seine et membre du GIP Maximilien. Financé par l’Etat et le Fonds social européen, le dispositif est porté par la région et piloté par Maximilien, tout en s’appuyant sur des coordinations départementales des clauses sociales dans chacun des huit départements.
En Seine-Saint-Denis comme dans le Val-de-Marne, c’est ainsi le conseil départemental qui porte la coordination. Dans les Hauts-de-Seine, c’est la maison de l’emploi et de la formation (MEF) de Nanterre. Cette dernière a par exemple facilité l’inscription d’heures d’insertion dans le cadre de la construction du stade-salle de spectacle U-Arena. Avec 136.000 heures réalisées au 31 mars 2017, dépassant l’objectif de 100.000 fixé par convention entre le donneur d’ordre privé et la ville de Nanterre, “140 personnes ont pu travailler, découvrir des métiers, se former”, s’est félicité Tarik Menchou, facilitateur chargé du projet à la MEF.
Améliorer la connaissance des acteurs de l’insertion et favoriser l’échange en amont du marché
En Ile-de-France, tous les départements n’ont pas encore le même niveau de connaissance des acteurs de l’insertion. “L’un des objectifs de la mission est d’avoir une cartographie régionale de ces acteurs, mais aussi des besoins, des zones blanches”, précise Flora Vigreux, Directrice du GIP Maximilien, interrogée par Localtis.
Dédiée au numérique, la matinée du 18 mai a inauguré un cycle de rencontres “OpenMap ESS” destinées à permettre aux acheteurs d’identifier des prestataires dans différents secteurs d’activité et d’établir un contact avec les facilitateurs de leur territoire. L’enjeu, pour Flora Vigreux, est de reconnaître le travail en “amont” sur un marché, la “gestion prévisionnelle”, le “sourcing”. Depuis la réforme du droit de la commande publique de 2015-2016, les donneurs d’ordre ont la possibilité d’échanger avec les structures d’insertion sur la définition de leurs besoins et leurs projets d’achats (voir notre article du 1er décembre 2016).
Outre l’appui juridique sur l’établissement des clauses qu’elle fournit, la Macs est chargée de recenser et de diffuser de bonnes pratiques et de “construire un kit commun”, avec notamment un enjeu d’harmonisation des critères d’éligibilité des publics dits “éloignés de l’emploi”. La mission de Maximilien consiste enfin à faire remonter des données et à intégrer la dimension sociale dans sa plateforme. “Ce projet, qui est une première en France, pourra avoir des répercussions ailleurs”, estime la Directrice du GIP.
Des partenariats inter-entreprises pour accéder à des marchés importants
De leur côté, les entreprises de l’ESS font face à plusieurs défis pour parvenir à remporter davantage de marchés publics. Elles doivent apprendre à mieux communiquer sur leur offre de service, à démontrer notamment l’intérêt à la fois économique, social et environnemental qu’il peut y avoir à travailler avec elles. L’entreprise Nodixia, entreprise adaptée spécialisée dans le reconditionnement de matériel informatique, a parfaitement intégré cet aspect. Elle valorise ainsi l’économie circulaire, l’insertion professionnelle de personnes handicapées, ainsi que la possibilité pour des collectivités qui ne respecteraient pas l’obligation d’emploi de se voir réduire leur contribution au FIPHFP (2)…
Autre défi pour ces entreprises : nouer des partenariats pour pouvoir accéder, malgré leur petite taille, à de gros marchés. Pour travailler à plusieurs ou s’allier avec une entreprise classique, les SIAE peuvent ainsi utiliser le Groupement momentané d’entreprise. Le groupe Ares a lui fait le choix de s’allier avec la Fondation Accenture et le fonds d’investissement d’impact Investir&+ pour créer Acces, une entreprise d’insertion réalisant notamment des tests informatiques. Avec onze établissements en France et 120 salariés permanents, le groupe Ares est toutefois unique dans un paysage caractérisé, selon Philippe Gobillon, Directeur de l’Union régionale des territoires pour l’insertion et l’emploi, par une “pluralité de petits acteurs”.
Quels que soient leur taille et leur statut, les entreprises présentes le 18 mai s’accordent sur l’idée que le numérique est un secteur particulièrement prometteur pour l’insertion.
(1) Direction régionale des entreprises, de la concurrence, du travail et de l’emploi.
(2) Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique.
A noter : le Réseau des collectivités territoriales pour une économie solidaire a récemment sorti un nouveau document “Points de repèrESS” sur les marchés publics et l’ESS. On y trouve une synthèse des principales dispositions relatives à la commande publique responsable de l’ordonnance du 23 juillet 2015 et le décret du 25 mars 2016 : l’intégration d’exigences sociales et environnementales, l’extension des marchés réservés et la simplification des procédures et de l’accès aux TPE-PME.
Le RTES rappelle que l’objectif fixé par le Plan national pour l’achat public durable 2015-2020 est d’atteindre, en 2020, une part de 25% de marchés comprenant au moins une disposition sociale et de 30% de marchés dotés d’au moins une mesure environnementale. En 2013, selon l’Observatoire économique de l’achat public, seuls 6,7 % des marchés d’un montant supérieur à 90.000 € HT comportaient une clause environnementale et 6,1 % une clause sociale.